samedi 5 mars 2016

Helena ALMEIDA. Corpus.

Peinture habitée, 1975. Photo DR.

Helena Almeida
Musée du Jeu de Paume.
Du 9 février au 22 mai 2016.

De cette exposition poétique, sereine et mélancolique, on ressort le cœur léger et la démarche allègre. Omniprésent dans le parcours de l’artiste, le corps (son corps) y est certes décalé, mais harmonique.

Les portraits (ou auto-portraits dérivés, pris par son compagnon) sont fréquemment retouchés d’une couche (d’une touche) de pigment bleu – qui n’est pas le bleu Klein (le fameux IKB), mais qui l’évoque immanquablement.

Les moyens - photos, cadres, tissus fins et transparents, accessoires minimum (comme de la corde, du fil de fer, quelques poignées de pigments) – sont économiques. La démarche, élégante, est aux antipodes de l’hystérie qui fut celle du body art.

Dans ce décor minimaliste, le corps des tableaux se joue des cadres, des châssis, des entraves et des obstacles semés sur leur route. Tout cela est très enfantin. Ludique. Joyeux. Comme cette Toile habitée de 1976 où, vêtue d’une ample robe de couleur claire, Helena Almeida a pour bustier une toile blanche : un tableau immaculé qui fait « corps » avec sa silhouette.

On comprend bien qu’elle se joue de la peinture, de la photographie, de la performance… et de son propre corps. – Un corps en mouvement. Toujours en déplacement et en transformation.

A la toute fin des années 1960 et dans les années 1970, le monde où elle se meut est un monde marqué par Yves Klein, par les toiles (fendues, découpées) de Lucio Fontana qu’elle découvre avec bonheur.

A elle désormais d’inscrire son corps dans la peinture, le tableau, le châssis, les miroirs et la photographie. La vidéo, enfin, lui apporte d’autres expériences : celles de la métamorphose, des apparitions et disparitions d’ombres et de figures qui s’éloignent, se rapprochent et s’évanouissent. – Sur le mode d'un dessin, d’un fusain évanescent.

Site du Jeu de Paume

Toile habitée, 1976. Photo DR.

3 commentaires:

Erwan Blesbois a dit…

Florence de Méredieu, ma prof de philosophie de l'histoire de l'art, à la Sorbonne, se livre à une critique de la psychiatrie moderne, qui dit-elle découle de la psychiatrie issue de la première guerre mondiale, où il s'agissait de renvoyer au combat les traumatisés psychologique de la guerre des tranchées. D'après elle, la psychiatrie moderne vise à faire des individus performants sans soucis de leurs états d'âme et de leurs éventuels doutes. Elle articule sa pensée autour des figures d'Artaud et Céline, tous deux combattants ou réformés de la première guerre mondiale. La première guerre mondiale, là est la matrice de notre société contemporaine. Mais je ne supportais pas non plus la hiérarchie des notes, imposées par l'Université, une autre forme de violence.

Erwan Blesbois a dit…

Je précise, bien sûr que je suis un "catholique athée", c'est un oxymore, mais je ne pourrai plus obtenir la foi ou la grâce à mon âge. Je suis catholique par amour de l'art et de mon environnement. Je suis catholique par amour des églises et des cimetières, par amour du patrimoine architectural et culturel de la Bretagne. Et je vomis la psychiatrie et la croissance qui nous mènent dans le mur. Mon fond est bobo, comme me le répète constamment Emmanuel Mousset (dont vous pouvez lire le blog en tapant son nom sur google), et le pire c'est qu'il a raison.

fdemeredieu a dit…

bonjour,


Vos remarques concernent non ce "papier" sur Helena Almeida, mais un autre lien auquel je renvoie le lecteur, pour qu'il puisse comprendre votre réaction.
http://florencedemeredieu.blogspot.fr/2015/05/artaud-guerre-pouvoir-et-psychiatrie.html

Ce que je décris dans le livre en question est la situation de la psychiatrie autour et pendant la guerre de 1914-1918 et aussi durant l'entre-deux guerre (1920 et au-delà jusqu'en 1948).
Vous évoquez la conclusion de l'ouvrage où je m'inquiète effectivement sur la question de savoir si ces éléments n'ont pas tendance à perdurer aujourd'hui.- Votre raccourci est plus brutal. Je ne fais pas dans cet ouvrage d'analyse de la psychiatrie "moderne" ou contemporaine, en précisant que cet ouvrage resterait à faire.
Ce qui concerne, par contre, une certaine psychiatrie de la première moitié du XXe siècle est clair, étayé et référencé.

L'art - et les cimetières bretons - ont sans doute de quoi panser nos inquiétudes.

Merci pour ce message.

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