dimanche 29 juillet 2018

GUTAI and SOULAGES. Face to Face.

Shiraga Kazuo painting with his feet. DR.

« Gutai. Space. Time »
The Soulages Museum of Rodez.
From July 7 to november 4, 2018.

What of common between Relieve, "Cistercian" painter, his blacks-lights, his shadows, his legendary (and refined) economy of means and the explosive movement Gutai, this cutting edge Japanese group which undertook, in 1954, to make a clean sweep of the past?

It was then a question for the members of the group of "doing what had been never made" (Yoshihara Jiro). As to paint with feet (Shiraga Kazuo), to use any sorts of uncommon materials, to throw on the canvas missiles of paint (Shimamoto Shozo), to drill at high speed a series of screens of paper (Murakami Saburo), etc... And to ensure (ESPECIALLY) that the paint is not anymore confined in the "picture of easel", that it becomes emancipated and clears off - on stage, outdoor, in the space, the time, the sky, the gardens and the pine forests.

Soulages also "painted" which was never painted, overrides paint, black, color, space, time, to find "elsewhere". In another space / time than its predecessors and unprecedented pictorial adventure.

The Gutai exhibition halls adjacent to the Museum Soulages. The two worlds will merge it developed. This exhibition represents the counterpoint, this openness desired by Soulages himself in what is "museum" on other adventures, other universes. And we dare add other heavens.

Backing the sky, granites windows of Conques open doubling on an inner and on an outer (transmitted opaquely, milky, declined over the hours and atmospheres). The Sky Festival, which participates Gutai in 1960, also opened him to the sky ; attached to balloons, the works were deployed in space.

The powerful gesture of Gutai painting, Gutai Theater, shares of Gutai, otherwise this gesture animates the brush strokes and brush Outrenoirs Soulages. In both cases, moreover, it seems that one is in a beyond calligraphy. It escapes, leaving its meaning, making himself matter. Pure-color material. Material light.

This, no doubt, that would end up - slightly osmosis, ephemeral - a painter like Soulages and the "kids" of restless Gutai origins. - There are in fact two Gutai : the movement of the first, rushing in all kinds of experiences and the Gutai (wiser) beginning to worry about the strength of the support of the work or object will be able to move and turn into "work of art".

Good art critic, in great artistic adviser, Michel Tapie pass by, directing the movement towards the network of international galleries. Then comes the "time table", the perennial work, own preservation, can circulate in the networks of the art market. This did not prevent the action, the action to continue. But the group now has traces solid.

The exhibition in Rodez stress this second side : the work and painting. However, do not forget the powerful gesture that gives rise to these works. And when speaking of gestures, it is often the setting in motion of the entire body. Traces of thick Shiraga Kazuo pasta is to perceive through the momentum and swing the artist's body. Hanging on a rope, the painter turns his feet wide and powerful brushes.

Do not forget, in the tour of the exhibition, the small room in which are presented photographs and documents. The essence of Gutai is delivered "raw".

Note-Bene : Few documents are now available in French on Gutai. Hence the interest of the rich catalog of the exhibition that takes stock of various aspects of the movement. To this valuable catalog should be added an older book, Gutai, Moments of destruction / Moments of Beauty. We will discover the beautiful text of a specialist Gutai, Atsuo Yamamoto who gives us an overview - high purity - the movement to its origins.

Website Museum Soulages

Exhibition catalog

Gutai, destruction Moments / Beauty Moments

SHIRAGA Kazuo, Tenkansei Nyuunryu, 1962 © DR.
Collection of Hyogo Prefectural Museum of Art.

vendredi 27 juillet 2018

SOULAGES et GUTAI. Face à Face.

Shiraga Kazuo au travail, années 1950, photographie (DR).

« GUTAI. L'espace, le temps »
Au Musée SOULAGES de Rodez.
Du 7 juillet au 4 novembre 2018.

Quoi de commun entre Soulages, peintre "cistercien", ses noirs-lumières, ses ombres, sa légendaire (et raffinée) économie de moyens et l'explosif mouvement Gutai, ce groupe japonais d'avant-garde qui entreprit, en 1954, de faire table rase du passé ?

Il s'agissait alors pour les membres du groupe de "faire ce qui n'avait jamais été fait" (Yoshihara Jiro). Comme de peindre avec les pieds (Shiraga Kazuo), d'utiliser toutes sortes de matériaux inusités, de lancer sur la toile des projectiles de peinture (Shimamoto Shozo), de perforer à grande vitesse une série d'écrans de papier (Murakami Saburo), etc.. Et de faire en sorte (SURTOUT) que la peinture ne soit plus cantonnée au "tableau de chevalet", qu'elle s'émancipe et prenne le large - sur scène, en extérieur, dans l'espace, le temps, le ciel, les jardins et les pinèdes.

Soulages aussi "peint" ce qui n'a jamais été peint, outrepasse la peinture, le noir, la couleur, l'espace, le temps, pour se retrouver "ailleurs". Dans un autre espace/temps que ses prédécesseurs et une aventure picturale inédite.

L'exposition Gutai jouxte les salles du Musée Soulages. Les deux univers ne s'y confondent point. Cette exposition représente ce contrepoint, cette ouverture souhaitée par Soulages lui-même au sein de ce qui est "son musée", sur d'autres aventures, d'autres univers. Et l'on oserait ajouter d'autres cieux.

Adossés au ciel, les vitraux granités de Conques ouvrent doublement : sur un intérieur et sur un extérieur (une lumière transmise de manière opaque, laiteuse et qui se voit déclinée au fil des heures et des atmosphères). Le Sky Festival, auquel participe Gutai en 1960, ouvrait lui aussi sur le ciel ; accrochées à des ballons, les œuvres se déployèrent dans l'espace.

La puissante gestualité de la peinture Gutai, du théâtre Gutai, des actions de Gutai, cette gestualité anime autrement les coups de pinceaux et de brosse des Outrenoirs de Soulages. Dans les deux cas d'ailleurs, il semble que l'on soit dans un au-delà de la calligraphie. Celle-ci s'évade, quitte son signifiant, se faisant matière. Pure matière-couleur. Matière-lumière.

C'est là, sans doute, que se retrouveraient - en osmose légère, éphémère - un peintre comme Soulages et les "bambins" remuants du Gutai des origines. - Il y a en effet deux Gutai : le mouvement du début, qui se précipite dans toutes sortes d'expériences et le Gutai (plus sage et plus tardif) qui commence à se préoccuper de la solidité du support, de l'œuvre ou de l'objet qui va pouvoir circuler et se transformer en "œuvre d'art".

En bon critique d'art, en excellent conseiller artistique, Michel Tapié passe par là, orientant le mouvement vers le réseau des galeries internationales. Vient alors le "temps du tableau", de l'œuvre pérenne, propre à la conservation, apte à circuler dans les réseaux du marché de l'art. Ce qui n'empêche pas le geste, l'action (tout cela qui constitue la quintessence du mouvement) de se perpétuer. Mais le groupe dispose désormais de traces plus solides. Au sens "physique" du terme.

L'exposition présentée à Rodez insiste sur ce deuxième versant : celui de l'œuvre et du tableau. Il ne faut point cependant oublier la puissante gestuelle qui donne naissance à ces œuvres. Et quand on parle de gestes, il s'agit souvent de la mise en branle du corps entier. Les traces et pâtes épaisses de Shiraga Kazuo sont à percevoir au travers de cet élan et balancement du corps de l'artiste. Accroché à une corde, le peintre transforme ses pieds en de larges et puissants pinceaux.

N'oublions donc pas, dans la visite de l'exposition, la petite salle où sont présentés photographies et documents. L'essence même du Gutai y est livrée "brute".

Nota-Bene. - Peu de documents sont aujourd'hui disponibles en français sur Gutai. D'où l'intérêt du copieux catalogue de l'exposition qui fait le point sur différents aspects du mouvement. À ce précieux catalogue il conviendrait d'ajouter un livre plus ancien, Gutai, Moments de destruction/ Moments de beauté. On y découvrira le très beau texte d'un spécialiste du Gutai, Yamamoto Atsuo, qui nous livre un aperçu - d'une grande pureté - sur le mouvement à ses origines.

Site du Musée Soulages

Catalogue de l'exposition

Gutai, Moments de destruction/Moments de beauté

Shiraga Kazuo, Tokko, 1989, photographie (DR)

jeudi 26 juillet 2018

L’OMBRE DES DIEUX. L’Île de Pâques à Rodez.

Moai Kavakava bicéphale, Île de Pâques,
Musée de la Rochelle. Photo DR.

Musée Fenaille
Du 30 juin au 4 novembre 2018.

Situé en plein cœur de l'Aveyron, le Musée archéologique de Rodez (ou Musée Fenaille) possède une remarquable collection de statues-menhirs anthropomorphes remontant à environ 5000 ans. Magnifiques de proportions, taillées dans un grès rosé et graniteux, ces figures furent découvertes - couchées - dans les champs environnants. Redressées, elles nous offrent aujourd'hui - de face et de dos - les marques signes et indices (anatomiques et sociaux) de ces personnages qu'elles étaient censées figurer (La Dame de Saint-Sernin, IVe-IIIe millénaire avant J.C.).

De là à imaginer (comme en écho) une exposition sur la statuaire (elle aussi anthropomorphe) de la lointaine île de Pâques, il n'y avait qu'un pas, allègrement franchi par des conservateurs passionnés. Ceux-ci sont partis à la quête de sculptures et d'objets qui ne possèdent pas le gigantisme des grands Moai qui tournent le dos à la mer et semblent ainsi veiller sur les populations de l'île. Les Musées du Quai Branly, de Bruxelles, de La Rochelle, d'Albi ou de Rochefort (Maison Pierre Loti), etc., ont ainsi transmis un ensemble conséquent d'objets et de statuettes, ordinairement épars mais précieusement rassemblés dans l'exposition.

En pierre, en bois poli, ces sculptures firent le bonheur des surréalistes : André Breton, Tristan Tzara, Paul Eluard les collectionnèrent. Pierre Loti les découvrira et dessinera lors d'un de ses premiers voyages. Parures et ornements, pectoraux, coiffes, bâtons rituels ou accessoires de danse se déclinent dans divers matériaux et continuent à entretenir le "rêve primitif".

Parmi les sculptures sur bois, on retiendra particulièrement les "moai kavakava" : figures humaines masculines d'une grande précision et dont la cage thoracique et le sternum sont comme exhumés du corps ; les côtes (kavakava) demeurent apparentes et en viennent à recouvrir le corps. Soigneusement polies, ornées de glyphes ou d'accessoires totémiques (et animaux), ces figurines possédaient vraisemblablement une fonction rituelle. On les sortaient des maisons et les promenaient lors de fêtes et de cultes communautaires.

Site du Musée Fenaille

La Dame de Saint-Sernin,
Musée Fenaille, IV-IIIe s. av J.C. Photo DR.