mardi 20 juillet 2010

LES PROMESSES DU PASSÉ: "ZERO DEMO" (ENDRE TOT).

Endre Tot, Zero Demo,Viersen, 1980, Performance.
Ph. Courtesy of the artist.

Le passé demeure une richesse. Incommensurable. Un ferment à réutiliser et réactualiser en permanence.

L'exposition "Les Promesses du passé" vient de fermer ses portes au Centre Georges Pompidou. En rendre compte au passé, c'est demeurer fidèle à l'intention qui l'anime : à savoir se situer dans une dimension non linéaire de l'histoire de l'art, le passé pouvant s'inscrire dans le temps de manière à en chambouler les strictes chaînes chronologiques.

"ZERO DEMO" : la performance-protestation du Hongrois Endre Tot (1980) s'inscrit dans le contexte ô combien particulier des années de plomb que vécut l'Europe de l'Est. La censure y était toute puissante. Le dédain aussi, vis-à-vis d'un mode d'expression (happenings, performances, avatars incertains de l'art conceptuel) venu de l'Occident. À moins que cet art ne suscite (comme ce fut aussi le cas) répression, enfermement ou bannissement.

L'expression artistique fut alors souvent en demi-teinte. Abstraite. Elliptique. Endre Tot excella dans ces formes de manifestations "blanches", ces actes de "micropolitique" dont la force demeure intacte.

Qu'est-ce qu'une "protestation zéro" ? Sinon le symbole et la quintessence de toutes les manifestations possibles. Autrement dit la PROTESTATION même.

En ces temps que nous vivons, face à une planète en déconfiture, un corps social abîmé, confrontés à un humain qui se retrouve dans des états bizarres, nous ne pouvons qu'en appeler à ce type de protestation blanche et MÉTAPHYSIQUE.

Alors oui : PROTESTATION ZÉRO. Protestation TOTALE.

lundi 5 juillet 2010

ANNIE MOLLARD-DESFOUR : LE NOIR - DICTIONNAIRE DE LA COULEUR.

Noir d'ébène. Noir de fumée. Noir de jais. Noir d'encre. Etc. Les expressions ne manquent pas pour décrire et spécifier les métamorphoses et divers aléas de cette « couleur » ou absence de couleur si particulière.

À l'ensemble de ces dénominations qui, toutes, se réfèrent à des matériaux, il faut aussitôt ajouter l'énumération d'une foule d'autres "matériaux" très distincts les uns des autres : anthracite, amadou, asphalte, bitume, carbone, caviar, corbeau, goudron, poix, etc. Tout cela s'exprimant, bien sûr, de manière alphabétique puisqu'il s'agit d'un dictionnaire.

L'intéressant reste ici précisément la richesse vertigineuse de termes et de sens obtenus par ces énumérations qui se croisent, s'entrecroisent et finissent par constituer un univers fascinant.

La couleur s'éprouve effectivement par les sens, mais aussi par les mots. Et c'est de ceux-là qu'il est question. De la richesse des mots de la couleur. Ces mots dessinent un paysage aux résonances sociologiques, ethnographiques et esthétiques.

Annie Mollard-Desfour, LE NOIR, Dictionnaire de la couleur, Mots et expressions d'aujourd'hui. XXe – XXIe, Préface de Pierre Soulages. CNRS éditions, 2010.