samedi 10 février 2018

Expansion CÉSAR. Une Logique de la Matière.

Centre Georges Pompidou. Vue d’exposition. Photo ©FDM, 2018.

Rétrospective César.
Au Centre George Pompidou jusqu’au 26 mars 2018.
César Baldaccini (dit César - 1921-1998).

« Mon atelier, c’est comme si c’était une carrière. » (César Baldaccini)

Expansions. Expressions. Compressions. Soudures. Modelages. Moulages. Agrégats. Empreintes. Coulures. Fusions. Tôles. Mousses. Résines. Aciers. Polyuréthane. Ferrailles. Cuivres. Pigments. Bronzes. Métaux. Plâtres. Plombs. Boulons. Vis. Ferrailles. Étoffes. Chiffons. Papiers.

Des plis. Des rides. Des creux. Des pleins. Des bosses. Des carcasses. Des grilles. Des rayures. Des Griffures. Des lignes. Des arabesques. Des sculptures.

Former. Agglutiner. Accompagner. Juxtaposer. Joindre. Suturer. Enrober. Figer. Évider. Poncer. Laquer. Aplatir. Déchiqueter. Tourner. Dévoyer. Recouvrir. Superposer. Vider. Remplir. Tourner. Eriger. Concevoir. Découvrir. Couper. Piquer.

Nouveau Réalisme. Gonzalez. Germaine Richier. Picasso. Arman. Rodin. Gustave Eiffel. Giacometti. Fiat. Peugeot. Ricard. Automobiles. Sculptures. Ailes. Roues. Caisse. Carcasses. Autoradio. Capot. Portes. Oiseau. Pots. Récipients. Centaure. Chauve-souris. Scorpion. Femme. Pouce. Sein. Poisson. Bouilloire.

Souplesse. Aridité. Moelleux. Rigidité. Ajourés. Trempés. Ouverts. Fermés. Ronds. Ajourés. Rouges. Roses. Verts. bistres. Ocres. Gris. Tous les gris. Les noirs. Les Blancs. Des jaunes. Des bleus. Des mélanges. Mats. Opaques. Transparents. Eclatants. Atones. Patinés.

Nota Bene. - La « Matière-César » se déploie tout au long de l ‘Histoire matérielle et immatérielle de l’art moderne et contemporain (Larousse, 1994-2017). 46 pages et occurrences.

Centre Georges Pompidou. Vue d’exposition. Photo ©FDM, 2018.

samedi 3 février 2018

Les Tulipes de KOONS… Au Fil de la Seine ?


Photomontage : « Contre-proposition »
pour une implantation de l’œuvre de Jeff Koons.
("D'après Jeff Koons, Bouquet of Tulips », 2016).
Photographie de la crue ©FDM, 2018.

Revenons sur l’actuelle polémique à l’encontre des « tulipes » offertes en bouquet par Jeff Koons à la France tout entière et à la Mairie de Paris plus précisément. En hommage aux victimes des attentats terroristes de 2016.

Le bouquet est « joli » et kitch à souhait. En acier « poli », coloré. Il serait bien anodin s’il n’était MONUMENTAL. Et encombrant dans tous les sens du terme, coincé qu’il est sur l'espace séparant le Palais de Tokyo et le Musée d’art moderne de la Ville de Paris. C’est donc, tout d’abord, la différence d’échelle qui fait problème. Si Jeff Koons nous avait proposé l’équivalent d’un bouquet de violettes grandeur nature, y aurait-on trouvé à redire ?

A cela il faut ajouter l’effet de distorsion de l’œuvre de Koons par rapport au style épuré des deux ailes du Palais des Musées d'Art moderne", érigé pour l’exposition de 1937 dans un style grandiose qui n’est pas sans évoquer l’idéal mussolinien de l’architecture.

Ce qui gêne aussi, (semble-t-il) c’est le caractère charmant de cet hommage fleuri, de cette « nature morte » (ou gerbe funéraire) d’un nouveau style. Occasion de rappeler que dans l’histoire de l’art, les fleurs et natures mortes sont légions et que - des maîtres hollandais du XVIIe et XVIIIe siècles jusqu’à Chardin, van Gogh, Cézanne, Odilon Redon ou Picasso - elles semblent n’avoir guère prêtées à polémique.

C’est qu’il y a ici un nouvel effet de DISTORSION, qui n’est plus seulement esthétique mais politique. Voire même « métaphysique ». Deux conceptions du monde s’affrontent : celle d’un certain art américain contemporain (qui déborde certes ses frontières) et joue dans un registre qui n’a rien à voir avec les soucis patrimoniaux ou la fibre humaine et patriotique de la vieille Europe…

Ces tulipes, Jeff Koons les avait déjà déclinées, à New York, à Bilbao aussi. Le contexte et l’effet produit étaient très différents. A Bilbao, les fleurs se trouvent bien au pied du Guggenheim, mais jetées au sol (et non érigées et triomphantes) ; elles y voisinent avec L’araignée de Louise Bourgeois. Le monumental Musée les écrase de toute sa hauteur et sa splendeur. Si on les remarque et les considère, c’est parce que l’on se dit : « tiens un Jeff Koons ! On reconnaît la « marque ».

Certains nous disent :« C’est un cadeau ; celui qui reçoit le cadeau peut en faire ce qu’il veut ! » - Voilà une appréciation bien superficielle de ce que représente un cadeau, surtout quand il est au départ initié par l’ambassadrice d’un grand « pays ami », l’Amérique. Il n’est sans doute pas besoin d’avoir lu le fameux essai de Marcel Mauss, L’Essai sur le don, pour comprendre qu’un cadeau fonctionne comme une sorte de piège qui oblige son récipiendaire. Rien de pire que de refuser un cadeau.

Nul doute que ces innocentes (mais « grandiloquentes ») tulipes ne jouent ici le rôle d’un cadeau empoisonné. Ou de ces patates chaudes que l’on se refile en silence.

HASARDONS UNE CONTRE-PROPOSITION : ces mêmes fleurs de Koons, érigées en bord de Seine, soumises et abandonnées aux aléas des intempéries, et puis noyées à l’occasion d’une de ces crues de la Seine que nous connaissons à l’heure actuelle… Ses tulipes y retrouveraient l’équivalent d’un vase naturel et de cette eau qui permet aux fleurs coupées de se maintenir fraîches…

Longue vie ALORS aux fleurs coupées multicolores de Jeff Koons… Que leurs reflets viennent iriser les eaux de la Seine, leurs lignes et coloris se métamorphoser dans les remous du fleuve. Lors de la prochaine crue, nous irons y contempler leurs pastellisations…, heureux que les eaux viennent perturber le côté très NICKEL de cet acier poli.

Mais la « vue », nous dira-t-on… et la perspective… Ne sont-elles pas classées, patrimoniales ? La lagune de Venise (en un tout autre lieu), tout au long des biennales d’art qu’elle abrite régulièrement, en a vu - et en verra - bien d’autres… des singularités, des métamorphoses, des incongruïtés.

Reste entière la délicate question de "l'hommage aux victimes"… La Seine ne pourrait-elle ici constituer le plus extraordinaire des cénotaphes et le plus juste des outils mémoriels, elle qui ne cesse de couler, de passer, de revenir…

Photomontage : « Contre-proposition »
pour une implantation de l’œuvre de Jeff Koons
("d'après « Bouquet of Tulips » de Jeff Koons", 2016).
Photographie de la crue ©FDM, 2018.