dimanche 6 octobre 2013

POUR FUJIKO NAKAYA. LA VILLE TANGUE DANS LE BROUILLARD.

Paris, le 5 octobre 2013. – Place de la République. Nuit blanche. Nuit grise. Fujiko Nakaya vient d’installer, sur le terre-plein central de la Place, ses brumisateurs et canons à brouillard.

Je suis arrivée par le métro. Sur le quai en sortant de la rame : les hommes de la sécurité de la ratp, chien muselé à la main. A la sortie, près du Boulevard Magenta, une famille de Roms (une famille : on voudrait dire une famille entière - hommes, femmes, enfants) couchés sous des couvertures pour des nuits qui n’en sont pas. Au milieu des passants, du bruit, de la foule.

Bruyante, hétéroclite, cette foule se presse dans le gris du terre-plein central. Un flot d’un gris moyen-âgeux envahit la place. On se perd. Brièvement. Mais où se perd-t-on ? Et l’on se retrouve dans un autre brouillard moins dense : des formes reconnaissables, des silhouettes d’amis qu’on connaît.

Des flaques humides. Des appareils photos dressés contre le ciel. La foule aussi est un brouillard. Dense. Si dense parfois que l’on cherche le vide, le creux. La nuit.

Je pense à ces Roms, sur le pourtour de la Place. A cette nuit blanche, cette nuit grise qui est leur lot commun. La ville est sauvage. Elle s’approprie et mange tous les paysages. – Et plus encore les humains.

Fujiko, Fujiko, la ville tangue dans le brouillard.

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