Photo ©FDM, 2015.
au Grand-Palais, Paris.
Du 1er avril au 3 août 2015.
Icône et égérie de la mode branchée et d’avant-garde, Jean-Paul Gaultier s’est souvent épanché sur les sources enfantines et familiales de sa passion pour le vêtement. Deux figures totémiques reviennent constamment dans le fil de ses récits : le nounours en peluche, le corset de la grand-mère.
Le nounours tout d’abord, objet transitionnel par excellence, qui joue dans l’histoire de notre héros la fonction d’un entre-genres et entre-sexes bien particulier. – Usé, délavé, manipulé et (on s’en doute) profondément chéri le « teady bear » de Gaultier se vit affublé (dès l’enfance) de deux protubérances coniques, préfiguration de ces bonnets et soutien-gorges surpiqués qui caractériseront certaines des créations les plus connues du couturier. Madonna y fit fureur dans un de ses shows.
Tendre nounours. Impertinent et naïf. Enfantin et stylé. Prêt à se parer d’une marinière (rayée comme il se doit), d’une casquette de marin, d’un kilt écossais ou d’un jean surbrodé. Jean-Paul Gaultier aime les mélanges, ose les croisements ethniques les plus incongrus, les plus sophistiqués : des cuissardes taillées dans des soieries et chinoiseries colorées, des pelisses d’esquimaux, des japonaiseries revisitées, des plumes et des corps d’oiseaux multicolores sur de sombres justaucorps.
Les matières et les emprunts aux différentes civilisations du monde sont pour Gaultier un inépuisable vivier : une peau de crocodile mordorée en sort qui pare le dos d’un vêtement [on trouve à la même époque – 2003 – cette même peau de crocodile, mais noire cette fois-ci, dans une veste en queue de pie (de crocodile) chez Azedine Alaïa].
On y trouve encore des peaux, des poils, des plumes, des franges… des paillettes, des broderies, des passementeries… et le fameux corset de la grand-mère. - Squelette. Apothéose et résumé du corps de la femme. Pièce archétypique dont la découverte eut pour l’enfant la réalité et le parfum d’une scène primitive. Jusqu’à devenir le modèle et l’archétype de toute représentation du corps humain.
Qu’est-ce qu’un corset effectivement, sinon la quintessence d’un appareillage de muscles, d’os et de baleines ? De cintres, de tiges et de rubans à lacer ? – Le corps de chair s’y construit et déconstruit et vient se confondre avec ce qui lui tient lieu de prothèse.
Jean-Paul Gaultier a su (comme nul autre) extraire le corset - instrument de contention - de l’histoire du vêtement. D’un « dessous » il a fait le seul « dessus » qui soit. C’est là le triomphe du « sous-vêtement » et de ce qui - caché, dissimulé - demeure l’armature et l’ossature de tout apparaître vestimentaire.
C’est là, dans l’exhumation et la réinvention de ce « vêtement du dessous » que Jean-Paul Gaultier s’est montré le plus créatif. Face à la diversité des différents « bâtis » ici exposés et proposés, à la prolifération des laçages, à la réinvention constante d’une prothèse qui de corset (ou de cage) se fait tutu, robe du soir ou de grand falbala, on demeure émerveillé.
Un mot sur le protocole même de cette exposition du Grand-Palais. Tout est ici présenté dans un joyeux et proliférant bazar. Dans une mise en scène très surchargée. Dans des décors dégoulinants de lumières, de motifs. C’est généreux, mais cela oblitère considérablement l’appréhension de chaque vêtement.
On enfile ici les créations comme des perles. Les images se chevauchent. C’est là (me semble-t-il) une erreur. La couture (Haute et « autre ») a droit au titre d’art. Encore faudrait-il que le processus de présentation des œuvres soit adéquat au but cherché. Et qu’il permette d’isoler CHAQUE vêtement, à la façon d’une ŒUVRE.
On a ici cherché le nombre, la quantité et voulu TOUT montrer, TOUT présenter. ENSEMBLE. Comme dans le brouhaha d’un défilé (de mode). Cela nuit à la vision des pièces les plus importantes (elles sont nombreuses). – La mode mérite une véritable présentation muséale. Jean-Paul Gaultier aussi. – Mais peut-être ne veut-il pas encore (déjà) entrer au Musée.
On enfile ici les créations comme des perles. Les images se chevauchent. C’est là (me semble-t-il) une erreur. La couture (Haute et « autre ») a droit au titre d’art. Encore faudrait-il que le processus de présentation des œuvres soit adéquat au but cherché. Et qu’il permette d’isoler CHAQUE vêtement, à la façon d’une ŒUVRE.
On a ici cherché le nombre, la quantité et voulu TOUT montrer, TOUT présenter. ENSEMBLE. Comme dans le brouhaha d’un défilé (de mode). Cela nuit à la vision des pièces les plus importantes (elles sont nombreuses). – La mode mérite une véritable présentation muséale. Jean-Paul Gaultier aussi. – Mais peut-être ne veut-il pas encore (déjà) entrer au Musée.
Exposition Jean-Paul GAULTIER au Grand-Palais
Photo ©FDM, 2015.
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