Le "compte-rendu" fait sur mon ouvrage en 2004 par Jean-Michel Bolzinger me passe à nouveau sous les yeux. Longtemps j'ai jugé inutile de répondre à tant d'approximations. Aujourd'hui, face à l'accumulation des erreurs et des approximations "factuelles" entourant l'œuvre et la vie d'Antonin Artaud, sans doute est-il salutaire d'apporter quelques précisions.
UN COMPTE -RENDU ?
L'article de Jean-Michel Bolzinger se présente sous la forme d'un compte-rendu. Bizarrement, les trois quarts des citations et références ne se trouvent pas dans mon livre et ne le concernent pas. La simple lecture de la table des matières de mon livre (voir sur mon blog) montre que celui-ci n'est pas pris en compte.
Ce livre se compose de deux parties :
Une histoire, tout d'abord, de la naissance de l'électrochoc en France. Le livre s'appuie strictement sur des FAITS, des DOCUMENTS ECRITS et (qui plus est) sur les discours des médecins eux-mêmes (ANNALES DE MEDECINE, OBSERVATIONS MEDICALES, OUVRAGES THÉORIQUES d'Ugo Cerletti, Rondepierre, Jean Delay, Peter Breggin, etc.). Il m'est difficile de dire (et citer) autre chose que ce que disent les médecins eux-mêmes. Alors ??? Je m'interroge. S'agit-il de la part de mes lecteurs du corps médical d'un déni ?
LES FAITS. LES CONTRADICTIONS DE FERDIÈRE.
Il ne sert à rien de m'opposer une interview de Ferdière évoquant les "8 électrochocs" administrés au poète, alors que le dossier médical de cette époque, conservé par Ferdière, fait bien état (documents à l'appui) de 58 électrochocs. Ce dont atteste l'ouvrage de Danchin et Roumieux, Artaud et l'Asile, publié six mois après mon livre. Ce qui compte ce sont les faits, les documents. Et non les bavardages et souvenirs lointains, très lointains, des uns et des autres.
Tout ce à quoi vous arrivez, c'est à montrer que les souvenirs de Ferdière étaient pour le moins lacunaires.
Je ne fais aucune "peinture", "cruelle" ou autre, de Ferdière. S'il y a "peinture", celle-ci s'esquisse d'elle-même au travers des faits, des documents, des discours et commentaires des psychiatres de l'époque. Je n'ai pas inventé la lobotomie pratiquée par Ferdière, pas plus que la vive critique émise par ses confrères. Cela figure noir sur blanc dans les Annales de médecine. Etc. Etc.
Toutes les critiques que vous m'adressez sont donc hors-jeu. Et pourraient témoigner de ce refus et ce déni d'un corps médical qui ne semble pas vouloir se rappeler son histoire.
LE DISCOURS D'ARTAUD
La deuxième partie du livre concerne le discours d'Artaud. Ses réactions à l'électrochoc. Il s'agit alors de rendre compte des textes mêmes et du discours d'Artaud. On ne peut leur faire dire le contraire de ce qu'ils disent.
UNE POLITIQUE DE LA SANTÉ MENTALE.
Vous me reprochez cette phrase :
"L'institution psychiatrique, relayée par les autres institutions — familiales, politiques et policières — gère désormais ce qu'il est convenue d'appeler la santé mentale".
Je rappellerai qu'Artaud a été arrêté à Dublin par la police irlandaise et renvoyé contre son gré sur le sol français où il a été interné d'office. Il passera dès lors 9 années dans les hôpitaux psychiatriques, et connaîtra la famine des années de guerre. C'est, par ailleurs, à la demande de sa mère que lui sera administré un premier électrochoc à Ville-Evrard (voir le dossier médical d'Artaud dont fait état une thèse, celle du Dr Le Gallais).
Il me semble donc que les 3 adjectifs employés — "familiale, politique [il y a à chaque époque une politique de la "santé mentale"] —, policière" correspondent ici à des faits. Précis. Têtus.
Et aujourd'hui ? Le problème a-t-il changé ? Je ne vois personne pouvoir le prétendre. — Là encore vous devriez relire les implacables analyses de Michel Foucault, en particulier Le pouvoir psychiatrique.
UN CURSUS. Étant, selon vous, "historienne d'art", on saisit à vous lire que je ne peux rien comprendre à la médecine.
Quelle est donc ma formation ? J'ai fait des études de philosophie, à une époque où le cursus était très complet et résolument pluridisciplinaire : psychologie, psychanalyse, psychologie expérimentale, histoire des sciences et (pour couronner le tout) un cours de sémiologie des maladies mentales (assuré alors par le Dr Thérèse Lempérière) avec présentations de malades à Sainte Anne.
Cet intérêt pour la médecine s'est perpétué avec la rédaction d'un mémoire de DEA sur "Le vivant chez Aristote et Descartes", qui s'inscrit au cœur des relations de la philosophie et de l'histoire médicale.
Mes recherches se sont ensuite poursuivies sur les relations de l'art et de la folie et, plus généralement, sur l'art moderne et contemporain. J'ai fait à l'Université des cours sur la psychanalyse, sur Michel Foucault, l'Histoire de la folie, etc. J'ai ensuite enseigné à la Sorbonne non pas l'histoire de l'art, mais la philosophie de l'art et l'esthétique. Je passe sur mes recherches sur Artaud qui se sont, à ce jour, concrétisées par sept ouvrages. — Vos informations sur mon "cursus" sont donc fausses et bien lacunaires.
Faut-il, par ailleurs, abandonner l'histoire de la médecine aux seuls médecins ? Michel Foucault ne le pensait pas. Et je suis strictement du même avis.
Ce livre, Sur l'électrochoc, le Cas Antonin Artaud a été écrit entre 1994 et 1996, durant deux années passées au CNRS. L'essentiel de la littérature psychiatrique française concernant l'électrochoc, à l'époque où Artaud l'a subi, a été par moi systématiquement étudiée et passée au crible. Mais c'est peut-être cela qui irrite : le fait que ce livre (précisément référencé et documenté) traite des faits et des écrits du corps médical lui-même.
* Une émission de radio (Gérard Gromer, Le Gai savoir) eut lieu sur France Culture à la sortie de Sur l'électrochoc le Cas Antonin Artaud. Elle peut sans doute se réécouter.
UN COMPTE -RENDU ?
L'article de Jean-Michel Bolzinger se présente sous la forme d'un compte-rendu. Bizarrement, les trois quarts des citations et références ne se trouvent pas dans mon livre et ne le concernent pas. La simple lecture de la table des matières de mon livre (voir sur mon blog) montre que celui-ci n'est pas pris en compte.
Ce livre se compose de deux parties :
Une histoire, tout d'abord, de la naissance de l'électrochoc en France. Le livre s'appuie strictement sur des FAITS, des DOCUMENTS ECRITS et (qui plus est) sur les discours des médecins eux-mêmes (ANNALES DE MEDECINE, OBSERVATIONS MEDICALES, OUVRAGES THÉORIQUES d'Ugo Cerletti, Rondepierre, Jean Delay, Peter Breggin, etc.). Il m'est difficile de dire (et citer) autre chose que ce que disent les médecins eux-mêmes. Alors ??? Je m'interroge. S'agit-il de la part de mes lecteurs du corps médical d'un déni ?
LES FAITS. LES CONTRADICTIONS DE FERDIÈRE.
Il ne sert à rien de m'opposer une interview de Ferdière évoquant les "8 électrochocs" administrés au poète, alors que le dossier médical de cette époque, conservé par Ferdière, fait bien état (documents à l'appui) de 58 électrochocs. Ce dont atteste l'ouvrage de Danchin et Roumieux, Artaud et l'Asile, publié six mois après mon livre. Ce qui compte ce sont les faits, les documents. Et non les bavardages et souvenirs lointains, très lointains, des uns et des autres.
Tout ce à quoi vous arrivez, c'est à montrer que les souvenirs de Ferdière étaient pour le moins lacunaires.
Je ne fais aucune "peinture", "cruelle" ou autre, de Ferdière. S'il y a "peinture", celle-ci s'esquisse d'elle-même au travers des faits, des documents, des discours et commentaires des psychiatres de l'époque. Je n'ai pas inventé la lobotomie pratiquée par Ferdière, pas plus que la vive critique émise par ses confrères. Cela figure noir sur blanc dans les Annales de médecine. Etc. Etc.
Toutes les critiques que vous m'adressez sont donc hors-jeu. Et pourraient témoigner de ce refus et ce déni d'un corps médical qui ne semble pas vouloir se rappeler son histoire.
LE DISCOURS D'ARTAUD
La deuxième partie du livre concerne le discours d'Artaud. Ses réactions à l'électrochoc. Il s'agit alors de rendre compte des textes mêmes et du discours d'Artaud. On ne peut leur faire dire le contraire de ce qu'ils disent.
UNE POLITIQUE DE LA SANTÉ MENTALE.
Vous me reprochez cette phrase :
"L'institution psychiatrique, relayée par les autres institutions — familiales, politiques et policières — gère désormais ce qu'il est convenue d'appeler la santé mentale".
Je rappellerai qu'Artaud a été arrêté à Dublin par la police irlandaise et renvoyé contre son gré sur le sol français où il a été interné d'office. Il passera dès lors 9 années dans les hôpitaux psychiatriques, et connaîtra la famine des années de guerre. C'est, par ailleurs, à la demande de sa mère que lui sera administré un premier électrochoc à Ville-Evrard (voir le dossier médical d'Artaud dont fait état une thèse, celle du Dr Le Gallais).
Il me semble donc que les 3 adjectifs employés — "familiale, politique [il y a à chaque époque une politique de la "santé mentale"] —, policière" correspondent ici à des faits. Précis. Têtus.
Et aujourd'hui ? Le problème a-t-il changé ? Je ne vois personne pouvoir le prétendre. — Là encore vous devriez relire les implacables analyses de Michel Foucault, en particulier Le pouvoir psychiatrique.
UN CURSUS. Étant, selon vous, "historienne d'art", on saisit à vous lire que je ne peux rien comprendre à la médecine.
Quelle est donc ma formation ? J'ai fait des études de philosophie, à une époque où le cursus était très complet et résolument pluridisciplinaire : psychologie, psychanalyse, psychologie expérimentale, histoire des sciences et (pour couronner le tout) un cours de sémiologie des maladies mentales (assuré alors par le Dr Thérèse Lempérière) avec présentations de malades à Sainte Anne.
Cet intérêt pour la médecine s'est perpétué avec la rédaction d'un mémoire de DEA sur "Le vivant chez Aristote et Descartes", qui s'inscrit au cœur des relations de la philosophie et de l'histoire médicale.
Mes recherches se sont ensuite poursuivies sur les relations de l'art et de la folie et, plus généralement, sur l'art moderne et contemporain. J'ai fait à l'Université des cours sur la psychanalyse, sur Michel Foucault, l'Histoire de la folie, etc. J'ai ensuite enseigné à la Sorbonne non pas l'histoire de l'art, mais la philosophie de l'art et l'esthétique. Je passe sur mes recherches sur Artaud qui se sont, à ce jour, concrétisées par sept ouvrages. — Vos informations sur mon "cursus" sont donc fausses et bien lacunaires.
Faut-il, par ailleurs, abandonner l'histoire de la médecine aux seuls médecins ? Michel Foucault ne le pensait pas. Et je suis strictement du même avis.
Ce livre, Sur l'électrochoc, le Cas Antonin Artaud a été écrit entre 1994 et 1996, durant deux années passées au CNRS. L'essentiel de la littérature psychiatrique française concernant l'électrochoc, à l'époque où Artaud l'a subi, a été par moi systématiquement étudiée et passée au crible. Mais c'est peut-être cela qui irrite : le fait que ce livre (précisément référencé et documenté) traite des faits et des écrits du corps médical lui-même.
* Une émission de radio (Gérard Gromer, Le Gai savoir) eut lieu sur France Culture à la sortie de Sur l'électrochoc le Cas Antonin Artaud. Elle peut sans doute se réécouter.
2 commentaires:
Chère Madame,
j'ai pris connaissance de votre message et viens de relire votre livre qui m'a une nouvelle fois beaucoup intéressé. Il m'a semblé honnête de faire disparaître l'article en question de la toile.
Je vous prie de croire en mes respectueuses salutations.
Jean-Michel Bolzinger
Monsieur,
Je vous remercie pour la courtoisie de votre réponse.
L'article concernant des éléments généraux qui ont pu faire question pour d'autres lecteurs, je laisse, quant à moi, ces développements sur le net.
Sans doute n'avais-je pas assez nettement marqué, dans l'ouvrage, la ligne de démarcation à introduire entre les deux parties de l'ouvrage :
- le point de vue des médecins
- le point de vue d'Artaud lui-même
et la résonance que ces traitements sont eu jusque dans son œuvre (les fameux Cahiers).
Quant à la manière dont j'ai travaillé (sur des archives médicales et sur les textes d'Artaud), elle est essentielle à la compréhension du texte.
Il en est de même pour ce qui est de ma formation, universitaire et autre.
Je ne suis pas intervenue sur ces questions en dilettante.
Bien cordialement à vous.
Et merci de m'avoir — en fin de compte — permis de clarifier mon point de vue.
Florence de Mèredieu
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